Extrait de l'article de Frédéric Lelièvre pour C Pour Les Hommes.
http://www.cpourleshommes.com/culture-musees-expositions/test-chronique-avis/anne-brunet-dialogue-avec-les-anges-a-la-galerie-13.html
Voilà une jeune artiste qui promet. Loin des arrogances intellectuelles, Anne Brunet ose avec une légèreté épatante s'amuser des genres pour construire un univers intemporel et très personnellement spirituel. Une dimension graphique fascinante où les angelots disputent à la mort le goût du noir. Surprenant, multiforme, et très séduisant !
À bien y regarder, Anne Brunet est un authentique auteur de conte. Pas ces niaises ritournelles où tout est rose et joyeux, mais les vrais contes, ceux qui ont traversé les siècles, souvent tailladés et censurés par le ressac des morales. Ces histoires éternelles où de petits héros pleins de candeurs croisent des ogres mangeurs d'enfants, des loups dévoreurs de mère-grand. Et la mort est toujours une invitée de marque pour ces vrais contes sans âges. C'est avec une fantaisie pleine de douceur, ainsi qu'une précision acérée, qu'Anne Brunet compose ses comptines graphiques, cruelles et élégantes, ludiques et, il faut le dire, charmantes. Follement éprise du noir – mais bien évidemment habillée d'éclatantes couleurs ! - l'artiste retravaille une vision bien particulière de la religion, de la mort, de l'au-delà. Sinistre tout cela ? Tout au contraire. Comme un jeu, elle niche dans chaque méandre de ses œuvres un soin hypnotique du détail avec une innocence enfantine, à la façon d'une fête des morts mexicaine.
D'où vient l'inspiration de cet autel surprenant où un crucifix de couleur apparaît dans la flamme vacillante d'une étoile, taillée dans le manteau de la cheminée qui la supporte ? D'où vient cette femme assise à sa coiffeuse, que l'on finit par discerner dans les déliés d'une tête de mort ? Ou cette silhouette guerrière de "Save me", grande gamine d'ombre portant fusil et nounours écarlate ? C'est toute la richesse de cette artiste qui assume avec malice sa totale liberté de style. Graphisme fort du tatouage, détail d'écailles et de volute d'estampes japonaises, romantisme gothique, tendresse ludique du manga : elle semble s'ingénier à trouver un trait d'union entre toutes ces expressions contemporaines. Et ne manque pas d'audace, à l'exemple de cette stupéfiante huile d'une tête de mort… noir sur noir. Loin d'être une bête provocation, c'est une astuce diabolique : intrigué on s'approche, pour découvrir alors dans les nuances de noir une foule de détails où tout sans cesse se recompose. Les arrêtes du nez s'avèrent être des ailes d'ange croisées, ailes qui révèlent elles-même d'autres détails…
On ne peut s'empêcher de décrypter des symboles imbriqués, leur donner une sens, pour découvrir qu'ils sont la pièce d'un autre puzzle graphique. Entre temps, la si menaçante tête de mort n'a plus rien d'intimidant ! Bien joué…
Une aisance empreinte de liberté qui permet à l'artiste de s'exprimer avec la même efficacité sur les supports les plus divers. À l'étage, les toiles côtoient des bustes blancs de chérubins habillés d'encre noire, une vraie réussite, ainsi que des poufs carrés, édités en petite série, à faire s'emballer les cinglés de l'aménagement intérieur… En sous-sol, passé le lapin vert géant - pas d'inquiétude, tout est normal… - vous découvrirez une longue table basse tout aussi réussie que les poufs, où il est conseillé de s'asseoir pour profiter des grandes fresques monochromes, peintes sur toile ou directement sur le mur. Lorsque la galerie devra décider du sort de ce mur, les débats risquent d'être douloureux… D'une élégance végétale et d'une étonnante gaieté, entre BD et graph', l'esthétique d'Anne Brunet s'accommode de toute évidence du trait le moins détaillé, faisant danser les jambes en bas résille sous les ronces, racontant un enlèvement romantique en un œil et trois jambes… Pas étonnant que les enfants apprécient cet univers !
Ultime support qu'on pourrait oublier tant il a sa place : les papiers peints, qui sont aussi signés de l'artiste ! Il ne fait aucun doute que l'inspiration étonnante et si féminine d'Anne Brunet, au-delà de son art, n'inspire tôt ou tard les dictateurs de style et du design. Espérons aussi que miss Brunet signe un jour les illustrations d'un vrai beau conte pour enfant ! Mais en attendant, ne manquez pas de la découvrir avec cette exposition, la première qui lui soit intégralement consacré. Vous pourrez ainsi vous vanter le moment venu…
Frédéric Lelièvre
- DIALOGUE AVEC LES ANGES -
Peintures - Sculptures - Installations - Wallpapers
OPEN YOUR EYES, H=36 cm. Dessin sur Plâtre, Pièce Unique, 2010, Photo : Eva Davier.
« La mort vaque à son œuvre dans la vie; elle ne va pas à l'aventure comme s'imagine le craintif (...).
Non; elle dit : je suis là; et si quelqu'un veut apprendre de moi, qu'il vienne. »
Søren Kierkegaard
A mi chemin entre paganisme et christianisme, les œuvres d’Anne Brunet ressemblent à des ex-voto ou des cadavéras. Célébrant la mort et la survie des âmes, l’art n’est plus ici au service des hommes, mais des anges : il ouvre entre le ciel et la terre un dialogue ; un monde d’images à partir duquel il devient possible d’entrer en communication avec l’au-delà. Et si la mort ne correspondait pas à la fin d’un processus vital, mais à la poursuite – sur un autre mode – de ce qui, dans la vie d’un homme est éternel ? Et si la mort, comme le voulait Socrate, ne signifiait pas la peine et le malheur, mais la libération du corps et la récompense du sage ?
Détournant l’iconographie catholique de son sérieux ordinaire, Anne Brunet nous invite à la célébration d’un culte dont la portée et la profondeur se mêle à la beauté des œuvres qui les supportent. Que ce soit dans sa série de dessins intitulée « Dieu », ou bien encore, dans son travail ornemental sur la figure des anges, un même silence religieux semble faire de ses œuvres de véritables effigies, autrement dit, des symboles vivants d’un « lointain proche », d’un « cristal de temps » capable de nous rendre présent ce qui n’est plus là. A la suite de Walter Benjamin et de ses réflexions sur l’aura, Anne Brunet ressuscite pour nous, le temps d’une exposition surérogatoire, la puissance auratique de l’art. Puisse la paix accompagner cette œuvre.
Frédéric-Charles Baitinger
« La mort vaque à son œuvre dans la vie; elle ne va pas à l'aventure comme s'imagine le craintif (...).
Non; elle dit : je suis là; et si quelqu'un veut apprendre de moi, qu'il vienne. »
Søren Kierkegaard
A mi chemin entre paganisme et christianisme, les œuvres d’Anne Brunet ressemblent à des ex-voto ou des cadavéras. Célébrant la mort et la survie des âmes, l’art n’est plus ici au service des hommes, mais des anges : il ouvre entre le ciel et la terre un dialogue ; un monde d’images à partir duquel il devient possible d’entrer en communication avec l’au-delà. Et si la mort ne correspondait pas à la fin d’un processus vital, mais à la poursuite – sur un autre mode – de ce qui, dans la vie d’un homme est éternel ? Et si la mort, comme le voulait Socrate, ne signifiait pas la peine et le malheur, mais la libération du corps et la récompense du sage ?
Détournant l’iconographie catholique de son sérieux ordinaire, Anne Brunet nous invite à la célébration d’un culte dont la portée et la profondeur se mêle à la beauté des œuvres qui les supportent. Que ce soit dans sa série de dessins intitulée « Dieu », ou bien encore, dans son travail ornemental sur la figure des anges, un même silence religieux semble faire de ses œuvres de véritables effigies, autrement dit, des symboles vivants d’un « lointain proche », d’un « cristal de temps » capable de nous rendre présent ce qui n’est plus là. A la suite de Walter Benjamin et de ses réflexions sur l’aura, Anne Brunet ressuscite pour nous, le temps d’une exposition surérogatoire, la puissance auratique de l’art. Puisse la paix accompagner cette œuvre.
Frédéric-Charles Baitinger
LOVE ME / HATE ME, H=29 cm L=30 cm. Dessin sur Plâtre, Pièce Unique, 2010, Photo : Eva Davier.
" Dialogue Avec Les Anges est le regard d'une enfant de 28 ans, sur un monde effroyable et beau à la fois : le nôtre.
Rien n'est jamais noir ou blanc, le bien et le mal dansent ensemble dans nos têtes...
Mais dans un monde aussi brutal, peut-on encore croire aux anges, aux esprits, aux bonne âmes ? "
"... J'assume totalement d'avoir ce côté à la fois très enfantin, une espèce de naïveté onirique... et en même temps de cultiver une certaine violence... Mon style oscille toujours entre enfantin et sombre, l'un ne va pas sans l'autre. Le côté onirique se caractérise par des personnages qui semblent rêver, partir vers le haut. Soit ils sont complètement enracinés, et là, c'est foutu pour eux, soit ils planent..."
Sur son imagination débordante Anne Brunet dit : " Il y a un réel épanouissement à puiser dans l’imaginaire. Cet univers fantasmagorique me permet de prolonger un peu plus mon enfance. Dans l’imaginaire il n’y a pas de barrières, pas de limites pour explorer la nature, les rêves... c’est un monde en mutation permanente donc passionnant."
Pour son premier solo show à Paris, Anne Brunet se joue encore des barrières pour laisser libre cours à son dessin qui s'exprime cette fois-ci sur des sculptures, du mobilier, des wallpapers et des installations aussi émouvantes qu'étonnantes.
" Dialogue Avec Les Anges est le regard d'une enfant de 28 ans, sur un monde effroyable et beau à la fois : le nôtre.
Rien n'est jamais noir ou blanc, le bien et le mal dansent ensemble dans nos têtes...
Mais dans un monde aussi brutal, peut-on encore croire aux anges, aux esprits, aux bonne âmes ? "
"... J'assume totalement d'avoir ce côté à la fois très enfantin, une espèce de naïveté onirique... et en même temps de cultiver une certaine violence... Mon style oscille toujours entre enfantin et sombre, l'un ne va pas sans l'autre. Le côté onirique se caractérise par des personnages qui semblent rêver, partir vers le haut. Soit ils sont complètement enracinés, et là, c'est foutu pour eux, soit ils planent..."
Sur son imagination débordante Anne Brunet dit : " Il y a un réel épanouissement à puiser dans l’imaginaire. Cet univers fantasmagorique me permet de prolonger un peu plus mon enfance. Dans l’imaginaire il n’y a pas de barrières, pas de limites pour explorer la nature, les rêves... c’est un monde en mutation permanente donc passionnant."
Pour son premier solo show à Paris, Anne Brunet se joue encore des barrières pour laisser libre cours à son dessin qui s'exprime cette fois-ci sur des sculptures, du mobilier, des wallpapers et des installations aussi émouvantes qu'étonnantes.
ANNE BRUNET
- DIALOGUE AVEC LES ANGES -
Peintures - Sculptures - Installations - Wallpapers
SOLO SHOW DU 6 MAI AU 12 JUIN 2010
Galerie 13 Jeannette Mariani
- DIALOGUE AVEC LES ANGES -
Peintures - Sculptures - Installations - Wallpapers
SOLO SHOW DU 6 MAI AU 12 JUIN 2010
Galerie 13 Jeannette Mariani
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